Existe-t-il un artisanat d’art mauricien clairement identifié? Autant est-il aisé de reconnaître les créations Made in India ou Bali, mais l’esprit couture local ramené sur le plan du fait-main affiche des contours plutôt flous. Il existe pourtant dans l’île quelques irréductibles passionnés qui tentent, envers et contre tout, de vivre de leur art.
Il suffit de musarder dans les boutiques touristiques, et l’on pense notamment au Craft Market du Caudan Waterfront, à Port Louis, pour s’apercevoir que ces espaces marchands dédiés aux visiteurs sont saturés d’articles en provenance de Madagascar, d’Inde et de nombreux autres pays asiatiques. Et si l’on parle de fabrication 100% locale, les touristes auront, là-bas, à choisir un objet souvenir parmi les collections de tasses et autres babioles à l’effigie du dodo ou de condiments et mignardises qui fleurissent sur les étagères.
Non, le savoir-faire mauricien à forte valeur ajoutée ne se trouve décidément pas sur les pistes balisées. Il se retrouve le plus souvent au fond de l’atelier d’un passionné qui, tout en poursuivant sa quête de l’excellence, regrette de ne pas être suffisamment soutenu par les organismes de tutelle pour rendre sa production visible du plus grand nombre. Car il semble que la plupart d’entre eux prêchent dans le désert… Maurice qui s’est engagé à fonctionner en tant que marché ouvert a vu, en effet, ses PME – et son secteur manufacturier en général – subir de plein fouet la concurrence des produits importés. Par manque d’économie d’échelle, d’absence de compétences internes, de soutien technologique et, non des moindres, de trésorerie solide.
Se faire connaître par tous les moyens
Raison pour laquelle, la SME Mauritius, – par extension, l’organisme de tutelle des artisans – entité qui a officiellement remplacé la SMEDA depuis janvier 2018, tente d’améliorer la qualité de production des créateurs artisans, la visibilité de leurs articles, leur compétitivité, via des sessions de formation qui portent sur le développement des relations B2B, du marketing numérique ainsi que par l’organisation de foires. Une autre initiative fort louable est celle de Made in Moris, qui œuvre dans le sens de la valorisation des produits locaux. Certes… mais ce label est surtout associé aux grosses manufactures industrielles, textiles et agro-alimentaires, car pour l’heure, dans la catégorie créateurs d’art, seuls le joaillier Ravior et l’atelier Studio44 y sont affiliés. Toucher un maximum de personnes, tel est le crédo de ceux qui travaillent de leurs mains. Chacun y va de son propre marketing, use des solutions digitales pour percer au-delà des frontières mauriciennes, tentent de convaincre les groupes hôteliers de commercialiser leurs produits dans les boutiques de leurs établissements et rêvent… d’un corner où ils pourraient exposer leurs créations dans la zone Duty Free de l’aéroport. Car le discours est unanime : pourquoi ne pas y réserver une place – justifiée – à l’artisanat d’art, qui est la vitrine du savoir-faire, et bien souvent, ultra-qualitatif des créateurs locaux… ?