Conséquence du confinement dans l’île décrété le 20 mars dernier, l’activité immobilière, pilier de l’économie locale a été suspendue. Mais quid de la situation après la reprise non seulement des travaux, mais de la remontée des équipes commerciales sur le pont ? Tout en admettant la part d’incertitudes quant à la datation d’un retour à une pleine activité, les professionnels se montrent néanmoins confiants dans l’avenir. Il faudra cependant faire preuve de patience.
Une question qui intéresse autant les acheteurs que les vendeurs… Les prix du marché de l’immobilier vont-ils s’effondrer ? A cette question s’opposent deux tendances, la première liée au marché de la location et la seconde à celle de la vente-acquisition. Les pertes d’emplois et la révision des salaires à la baisse (concernant de nombreux cadres) engendrées par la situation de crise sanitaire obligeront à une révision des loyers qui ont connu une envolée folle, voire exagérée ces dernières années, reconnaissent une majorité de professionnels. « Cela va permettre de remettre un peu d’ordre quant aux prix prohibitifs des locations, ce qui vaut aussi sur le marché de la vente, mais je ne pense pas ce dernier soit impacté de beaucoup », rapporte Olivier Prodhon de OPI Immobilier. En effet, ceux qui sont à l’affût des opportunités, des bonnes affaires à conclure sur le marché des biens de luxe de type RES-IRS-PDS risquent la déception. Car, même s’il faut s’attendre à un différé dans les délais de livraison et même si la visibilité des promoteurs sur le long terme est quelque peu brouillée, les fluctuations du marché, si elles surviennent, ne devraient pas (ou peu) impacter la valeur de ce type de bien.
La construction à l’arrêt mais une commercialisation active
Le télétravail, étant devenu la norme dans un contexte de confinement, a permis aux équipes commerciales de continuer le suivi des dossiers de réservation en cours et d’accompagner le client. C’est ainsi que celle de la Smart city de Tamarin du groupe Trimétys a conclu un accord avec un partenaire financier afin de faciliter la recherche de financement sur le projet de résidence senior Freedom Hill, ainsi que la possibilité de réserver un bien à distance.
Agen Ragavaloo, fondateur de Quality Builders Ltd, tant promoteur de projets de type RES/PDS que de résidences réservées aux Mauriciens relate avoir conclu trois ventes à des Français pendant le confinement, « mais sur des produits équivalant à 300,000 euros. Sur les biens de 1M d’euros et plus, je sens les étrangers un peu plus réticents aujourd’hui ». Quant à la Smart City de Beau Plan, elle a finalisé des réservations pour son projet d’appartements et duplex Mango Village, vendu à hauteur de 75% aujourd’hui. Dans l’Est, sur le site d’Anahita, David Martial, Commercial & Development Director à Alteo Properties fait état de deux types de discussions conduites avec les acheteurs durant le confinement. « Outre le seul désistement auquel nous avons eu affaire, nous avons accompagné nos réservataires qui souhaitent repousser quelque peu l’échéance de l’achat. L’autre niveau de discussion s’est tenu avec des acheteurs intéressés mais qui n’ont pas réservé. Or, on ne réserve pas un type de bien tels que ceux proposés par Anahita sans faire le déplacement, ce qu’empêche aujourd’hui la fermeture du ciel ».
Du temps avant un retour à la normale
Pour Joël Couve de Murville, Head of Sales & Marketing chez Novaterra, il est encore trop tôt pour avoir une lecture claire de l’impact qu’aura la crise sur les différents marchés à Maurice (et à l’étranger) dans le court et moyen terme. Mais il faut s’attendre à un impact tant au niveau de l’offre que de la demande. « Nous aurons aussi simultanément à faire face à des coûts de constructions qui vont augmenter et à une baisse du pouvoir d’achat en général. Il nous faudra donc trouver des solutions afin de continuer à offrir des projets qui répondent à une demande qui va évoluer tout en restant dans des prix compétitifs ». Trimétys a constaté quant à lui un effondrement des demandes émises depuis l’Europe et l’Afrique du Sud à l’annonce du Covid-19 (mais note depuis peu que les visites sur son site web provenant de ces mêmes zones ont tendance à repartir) ainsi qu’une baisse drastique des demandes sur le marché local, durant les premières semaines de confinement. « Les préoccupations à ce stade étaient différentes, il fallait se réinventer avec le télétravail, l’école à la maison… Par contre, une fois cette étape passée, nous avons senti un regain d’intérêt des Mauriciens. Il faudra cependant un peu de temps avant un retour à la normale, la crise sanitaire ayant eu des impacts considérables sur l’activité économique du pays. »
L’immobilier, toujours une valeur refuge malgré la crise
Maurice jouit, à l’extérieur, de l’image d’un pays ayant bien su gérer sa crise sanitaire et « on la perçoit désormais comme un refuge avec un bon niveau de gouvernance, ce qui explique que l’intérêt que suscite notre île est loin d’être refroidi », selon David Martial. En plus de cette image île refuge, dans le contexte actuel, plus que jamais, l’immobilier reste une valeur offrant une solution plus pérenne et moins volatile que certains placements financiers. « Car, contrairement aux valeurs mobilières de placement, l’immobilier est tangible et bénéficie aussi d’une valeur intemporelle : que ce soit pour la location ou pour l’achat. De plus, un placement immobilier est moins soumis à des fluctuations liées à la conjoncture économique, comme c’est le cas pour la bourse », selon Trimétys. Un positionnement totalement partagé par David Martial, faisant valoir la constante évolution de la valeur de l’immobilier, facteur indissociable de l’étroitesse d’un territoire. « En revanche, le choix du projet ainsi que la crédibilité du développeur restent déterminants afin d’optimiser le retour sur investissement ainsi que son potentiel de croissance dans la durée », souligne Joël Couve de Murville.
La solidité du promoteur et la pertinence du projet déterminant
Premier point, la crise amènera certainement vers les oubliettes les promoteurs les moins solides. C’est-à-dire ceux qui en sont au début des travaux, et qui n’ont pas atteint le niveau d’équilibre. Second point, les biens à réelle valeur ajoutée, ancrés sur un site rare susciteront toujours l’intérêt des investisseurs locaux et étrangers. A ce niveau, les promoteurs de Beau Plan appuient sur le fait que leur Smart City contient tous les ingrédients nécessaires afin de garantir un investissement pérenne et une qualité de vie exceptionnelle. « La communication autour de nos projets mettra l’emphase sur le cadre de vie, la proximité de parcs urbains et d’espaces verts, la proximité des services et les loisirs. Il est primordial de permettre aux consommateurs d’aller au-delà du simple bien immobilier mais de faire en sorte qu’ils se projettent dans cet environnement de vie qui sera le leur », selon Joël Couve de Murville. Pour l’IRS Anbalaba, de Baie du Cap, le confort de l’habitat étant un des points majeurs du programme, la conception des villas a été étudiée dans les plus grands détails pour que celles-ci soient bien positionnées sur le terrain : pour optimiser la vue sur le lagon et le coucher du soleil, s’orienter par rapport aux vents principaux qui arrivent le plus souvent du Sud-Est, s’accorder avec la nature pour être bien chez-soi à n’importe quelle heure de la journée. De même que les habitations ont aussi été réfléchies pour offrir aux résidents le meilleur confort : les espaces de vie profitent d’une ventilation naturelle qui régule naturellement la température intérieure. Les chambres des villas ont une toiture végétalisée qui facilitera la régulation thermique même en période de fortes chaleurs… ect. Et c’est sur ces arguments que Cécilia Bouigue-Robert, directrice associée compte appuyer. Quant à Anahita, sa faible densité d’occupation de l’ordre de 13%, couplée à sa réputation de destination golfique, feront plus que jamais partie des arguments séduction dans sa communication.
Quid de l’avenir
Attendre un peu pour se faire une idée, tant du côté des promoteurs que des investisseurs. Telle est la posture actuelle. Par la force des choses compte tenu de la fermeture des frontières, empêchant toute visite de biens pouvant déboucher sur une réservation, mais aussi donner au temps la mission d’effacer le doute quant à un choix financier conséquent, en temps d’incertitudes. Pour Joël Couve de Murville, le développement immobilier de l’île a néanmoins encore de beaux jours devant lui. Car les gens devront toujours se loger, les seniors trouver des solutions adaptées à leurs modes de vie et les jeunes actifs un foyer qui leur est propre. Maurice a aussi d’énormes atouts sur lesquels les développeurs fonciers peuvent s’appuyer afin d’attirer une clientèle étrangère, capitale pour le pays et son développement économique. Mais tempère t-il, « Cependant, cette période très spéciale doit également nous remettre en question sur le nombre de projets immobiliers que Maurice verra se développer dans un futur proche. Il ne faut pas succomber à l’appel du quantitatif au-delà du qualitatif ». Trimétys argue que les nombreux développements immobiliers en cours et à venir, contribueront par ailleurs à la relance économique du pays, puisque le tourisme a été fortement impacté. Même s’il faut s’attendre à une baisse de la performance du secteur estimée à 8,5% par Statistics Mauritius en début d’année, le promoteur espère que la réouverture des frontières, synonyme de flux d’investissements directs étrangers entrants relancera la machine, dont l’immobilier. Outre la reprise des travaux et la commercialisation d’Happy Village, Trémétys a décidé en plus de se focaliser sur le marché local en lançant début juin la commercialisation du projet O’Patio qui répond aux besoins de plusieurs catégories d’acquéreurs mauriciens: célibataires, couples primo-accédants, jeunes familles et investisseurs. Et de préciser qu’afin d’aider au relancement du secteur, il serait appréciable que le gouvernement prenne certaines mesures. Bonne nouvelle, le nouveau budget de l’Etat dévoilé le 4 juin dernier indique que le montant minimal d’investissement pour obtenir le statut de résident permanent en tant que détenteur d’un bien, pour un étranger, passera de 500 000 USD à 375 000 USD. Un argument qui vise à inciter un plus grand nombre à investir dans notre île. Les nouveaux projets Rive Est, Hédonia et Bassin Lubin d’Anahita restent également dans la lance de rampement pour finaliser les ventes des quarante lots encore disponibles.
Une part d’observation nécessaire sur l’évolution du marché, en local comme à l’international, de la patience avant de faire l’expérience d’un retour à la normale, une communication axée sur le caractère unique des biens, un recalage de positionnement pour se tourner vers les investisseurs mauriciens pour certains…, les promoteurs se doivent être réactifs et créatifs. Mais ils ne semblent ne pas s’être déparés de leur confiance en l’avenir… Car associé à la perception accentuée que l’investissement immobilier représente plus que jamais une valeur refuge, l’île en elle-même, fait figure de village gaullois ayant su se préserver de la menace sanitaire COVID-19.