« La politique du logement en outre-mer a besoin d’un nouveau souffle » a déclaré Annick Girardin, ministre des Outre-mer en introduction de la conférence du logement, tenue le 31 janvier dernier à Paris en présence de représentants de chaque territoire concerné. « Nous souhaitons construire des logements zéro carbone, zéro déchet et zéro risque a renchéri la Ministre ». La route est encore longue pour espérer atteindre le triple objectif. – Stéphane Guillebaud
A ce jour, le constat s’avère bien moins flatteur. A La Réunion, comme dans les autres DOM, où près de 80% de la population est éligible aux minima sociaux, le logement souffre de trois grands maux: l’insalubrité de certains appartements, – vieillissant ou construits en dépit du bon sens à une époque où les promesses de la défiscalisation attiraient encore nombre de promoteurs de pacotille -, la rareté du foncier et le retard pris dans la construction. Rien qu’à Saint-Denis, où 600 logements neufs sont livrés chaque année, plus de 5000 personnes sont toujours en attente d’un logement décent.
Pour tenter de résoudre l’équation, la ministre des Outre-mer entend agir sur trois principaux leviers: libérer et aménager du foncier, construire des logements neufs et réhabiliter le parc existant en luttant contre l’habitat indigne et en favorisant la transition énergétique dans le secteur du bâtiment.
Attirer des investisseurs étrangers
La préparation du plan logement 2019-2022 fera encore l’objet de plusieurs ateliers décentralisés en février et mars. Sa présentation est quant à elle prévue le 14 juin. Seule certitude à ce jour, pour fonctionner, le plan logement aura besoin d’argent. On peut donc s’attendre à ce que les prochaines décisions favorisent pour partie l’investissement locatif. Actuellement, le dispositif Pinel de défiscalisation, accordant des réductions d’impôt aux acquéreurs de logements destinés à la location, n’attire logiquement que des investisseurs réunionnais ou métropolitains puisque payant leurs impôts en France.
Il est tout à fait plausible que de nouvelles dispositions soient prises en faveur d’investisseurs étrangers, un peu à l’image de la convention fiscale franco-mauricienne, qui favorise et encadre l’achat de biens immobiliers à Maurice par des résidents français. Le prochain plan logement sera également regardé de près par les candidats mauriciens à l’immigration, dont le nombre de cesse de croître depuis 2010. Ils seraient 15000 chaque année, à tenter l’aventure hors des frontières. Au Canada, en Australie, au Qatar, aux Emirats Arabes Unis, en Europe, bien sûr, mais aussi à La Réunion pour certains qui ne souhaitent pas trop s’éloigner de la terre de leurs ancêtres (*).
Les nouveaux cœurs de ville
Parmi les projets déjà lancés, l’un des plus spectaculaires concerne les nouveaux Cœur de ville. Engagées par l’Etat et les collectivités territoriales, ces opérations de redynamisation urbaines concernent 13 villes des DOM dont La Possession. Engagé en 2016, le programme prévoit d’ici 2025 la construction de 1600 logements, de bureaux, de commerces et d’une école, l’aménagement d’une ZAC et des voies de circulation. Un nouveau quartier éco-responsable, moderne et connecté, sort de terre à La Possession.
Les investisseurs et les autres
Si la reconduction du dispositif de défiscalisation Pinel a fait le bonheur des investisseurs, essentiellement métropolitains pour l’instant, le législateur a quelque peu oublié une part non négligeable de candidats à l’acquisition d’un logement: les locaux. Le volet Girardin, qui ouvrait la défiscalisation aux acquéreurs d’une résidence principale, a été supprimé faisant des Réunionnais les grands perdants de la politique logement dans leur propre île.
(*) Ces chiffres émanent d’une étude réalisée en 2013 par le groupe Defimedia.info